EPU95 –
Montmorency
Médecine Interne
Mise à jour du 10 Mai
2007* 

Choix et
Optimisation dans la Prescription des Antibiotiques
Pr. MH. Nicolas-Chanoine
Chef de service
de Microbiologie et d’Hygiène (Hôpital Ambroise Paré)
Séance du 2
Octobre 2003
1. PRELIMINAIRES
Quelques rappels simples sont nécessaires, dans la
prescription des antibiotiques, pour choisir quand et comment les utiliser
à bon escient.
1.1. Origine des antibiotiques actuellement employés
L’origine d’un antibiotique est presque toujours une
molécule découverte chez des micro-organismes vivants. Un micro-organisme qui synthétise une molécule tolère sa présence.
Il résiste à sa présence.
Antibiotique et résistance des micro-organismes sont
donc 2 éléments que l’on ne peut pas nier par l’historique même des
découvertes de ces molécules.
Si par exemple une molécule est produite par un
streptomyces, ce streptomyces résiste à cette molécule. S’il résiste,
c’est qu’il existe un mécanisme qui le lui permet.
La cible de l’antibiotique se situe au niveau d’une
structure ou d’un fonctionnement vital pour la bactérie qu’elle combat. A
l’inverse des antiseptiques qui ont une action chimique, l’antibiotique
doit trouver la cible sur laquelle il peut agir (l’AB est la clef, la cible
est la serrure), cible qui est vitale pour la bactérie.
1.2. La bactérie
C’est un organisme vivant unicellulaire :
4
Auto-réplicatif par scissiparité è
1 donne 2, 2 donne 4, etc.
4
Avec un temps de génération court è
20 minutes à 24 heures.
Cette situation a comme corollaire : la bactérie
vit en population (106 bactéries /ml dans une infection
urinaire)
1.3. La classification des antibiotiques
Elle a été établie en fonction de la cible qu’ils
atteignent. Il y a dans la bactérie des structures ou des fonctions
métaboliques que vont essayer de stopper les AB. En gros 3 cibles :
Le peptidoglycane
Il n’existe que
chez les bactéries et est un constituant essentiel de la paroi bactérienne.
L’antibiotique, en se liant à des enzymes commandant la
synthèse du peptidoglycane, altère cette synthèse et fragilise la paroi de
la bactérie qui sera tuée par une lyse osmotique.
Trois familles d’antibiotiques visent cette cible :
4
les ß-lactamines : pénicillines, amoxicilline,
céphalosporines
4
les glycopeptides utilisées pour l’instant qu’en
milieu hospitalier
4
la fosfomycine
Le chromosome
L’antibiotique peut agir sur le chromosome de deux
manières, en entravant :
4
La réplication du chromosome è
2 groupes d’AB : les quinolones et les fluoroquinolones
4
La transcription des gènes è
un seul AB : la rifampicine.
La synthèse protéique
L’AB en inhibant cette synthèse va réduire la croissance
microbienne. Dans cette classe thérapeutique, plusieurs familles :
4
Macrolides, kétolides et apparentés
4 Aminosides (genta, kana, tobra,
strepto,.)
4
Tetracyclines
4
Chloramphénicol
4
Sulfamides
Schéma des cibles

1.4. L’utilisation des AB
Elle va stimuler chez les bactéries leur système de
défense, car elles sont des êtres vivants. Ils peuvent le faire de deux
manières :
4
En
sélectionnant des souches résistantes. Ces « mutants » vont
continuer de vivre et l’antibiotique ne sera pas capable de les
reconnaître.
4
En acquérant (et cela est propre au monde
bactérien) de l’information
génétique codant la résistance (plasmides, transposons, intégrons)
qu’elles puisent dans le monde extérieur.
1.5. Le nombre de bactéries
Il y a plus de bactéries que de cellules dans (et sur)
notre organisme.
2. LA
RÉSISTANCE AUX ANTIBIOTIQUES
La résistance des bactéries aux antibiotiques, par son
importance est devenue un problème de santé publique.
Le plan dit « Kouchner » est un plan national
pour préserver l’efficacité des antibiotiques (circulaire du 2 mai 2002).
Il a mis en place un Groupe de Travail. Une sensibilisation auprès du
« Grand Public » doit permettre que les médecins ne soient pas
isolés dans cette politique de restriction possible et nécessaire
2.1. Pourquoi ce plan ?
Il y a trop d’antibiotiques consommés avec pour
corollaire (outre leurs effets iatrogènes) une augmentation croissante de
la résistance des bactéries. Quelques exemples, en France :
4
30 millions de prescriptions par an d’AB pour des
infections respiratoires d’origine virale :
o
40 % des rhinopharyngites
o
80% des bronchites aiguës è
leur origine virale ne justifierait qu’un traitement symptomatique et non
d’AB
o
90% des angines
4
Les pneumocoques ont été, pendant près de 50 ans,
très sensibles à la Pénicilline V. La survenue de résistance a alerté les
pouvoirs publics. Une étude sur les antibiogrammes de pneumocoques isolés
de pus d’otites (2001) a montré un pourcentage élevé de résistance
intermédiaire ou de résistance vrai :
Pneumocoques résistants en 2001
|
Infectieuses
|
R intermédiaire
|
Résistants
|
Pénicilline
Amoxicilline
Céfotaxime
Cotrimoxazole
Erythromycine
|
76 %
47 %
30 %
40 %
80 %
|
20 %
3 %
|
Il existe donc un taux de résistance particulièrement
important à tous les antibiotiques qui étaient utilisés. Il est à noter que
dans cette étude il existe un biais : elle n’étudie pas l’ensemble de
la sensibilité des pneumocoques présents dans le rhino-pharynx. Les
prélèvements n’ont pas été systématiques après toute paracentèse mais ils
ont été faits surtout lors d’otites traînantes, ou compliquées.
2.2. La résistance aux antibiotiques dans les infections urinaires
Méthodologie
Une étude prospective portant 106 patients consécutifs
(enfants + adultes, sondage exclu) + 2 soignants ayant une IU à E. coli sur
la conséquence de l’exposition à l’Augmentin® (AMC) (2002 à Ambroise Paré)
lors d’infection urinaire (IU) :
4
84 adultes
o
71 en médecine, 9 en urologie, 3 en orthopédie et 1
en réa médicale
o
70% > 70 ans)
4
22 en pédiatrie
o
85% < 2 ans
4
2 soignants
4
78 avec IU acquise en ville et 30 acquise à
l’hôpital
Une enquête a été menée :
o
Pour rechercher une prise éventuelle d’AMC dans le
mois précédent l’infection,
o
Sur la ou les molécules utilisées pour traiter
l’IU,
o
Avec la recherche quantitative dans les selles
d’E.coli résistant à l’AMC dès le diagnostic d’IU posée
Résultats
Des antibiogrammes sur les prélèvements urinaires ont
révélé :
4
17/108 patients (16%) avaient un isolat de E. coli
vrai résistant à l’Augmentin™
4
16,7 % pour les affections acquises en ville et
13,3 % pour les infections acquises à l’hôpital.
Parmi ces 17 patients, 12 (11%) avaient pris de l’AMC
dans le mois précédent l’IU (4 enfants de 3 à 6 mois et 8 adultes (moyenne
d’âge 70 ans).
E.coli
R AMC chez les patients exposés à l’AMC avant l’IU : 6/12 = 50%
E.coli
R AMC chez les 95 patients non exposés à AMC avant l’IU : 11/96 =
11,5%
L’exposition à l’Augmentin™ est un facteur de risque de
faire une IU à E. coli résistante à l’AMC (Risque Relatif multiplié par 4.4
- IC 95% (1,97 à 9,65) par rapport à ceux qui n’avaient pas cet ATCD;
P<0,001).
Résultat des examens de selles avec distribution des
isolats E.coli résistants en fonction du traitement donné pour l’IU à E.
coli, le prélèvement de selles ayant été effectué dans les 48h de la mise
en route du traitement :
Tableau
1
|
Nombre
de patients dont les selles contiennent
|
Traitement
|
E. coli
|
Gram (-)
AMC-R
|
Germes
AMC-S
|
Pas de
Gram (-)
|
Total
|
Amoxicilline
Augmentin™
Fluoroquinolone
Céfotaxime/ceftriaxone
Autres molécules
Aucun
|
4
2
2
1
1
0
|
1
2
0
3
0
2
|
0
2
5
7
0
3
|
0
0
2
9
0
0
|
5
6
9
20
1
5
|
Total
|
10
|
8
|
17
|
11
|
46
|
Le traitement de l’infection urinaire par amoxicilline
ou par Augmentin® comparativement aux autres traitements (traitement par
AMC exclu) est un facteur de risque d’avoir dans le tube digestif des
isolats d’ E.coli R AMC.
2.3. L’Observatoire National de l’Epidémiologie de la Résistance
Bactérienne
Cet organisme est chargé de la surveillance de la
résistance bactérienne aux antibiotiques. Cette surveillance est effectuée
essentiellement par des personnes qui travaillent en réseau, au niveau de
laboratoires tant de ville qu’hospitaliers.
Une étude concernant la sensibilité de E. coli isolés
lors d’infections urinaires en fonction des antécédents d’hospitalisations
a montré que les patients qui ont été hospitalisés dans les 6 derniers mois
ont plus de risque d’avoir une infection à E. coli résistant vis-à-vis d’un
certain nombre d’antibiotiques que ceux qui n’ont jamais été admis. Lorsque
l’hospitalisation date de plus de 6 mois, ce risque s’atténue rapidement.
Une autre étude a montré que les personnes ayant des
antécédents d’IU traitée dans les 6 mois de la nouvelle poussée d’IU ont
plus de risque d’avoir des souches de bacilles à résistance augmentée.
Les facteurs de risque dans l’infection urinaire lors de
la prise en charge en ville peuvent être résumés dans le tableau 2
ci-dessous
Tableau 2
|
Risque d’avoir
|
Facteurs de risque
|
Une autre espèce que
E. coli
|
E. coli résistant aux
antibiotiques
|
Age
Sexe
Sondage urinaire
Antécédents
Traitement AB
Infection urinaire
Hospitalisation
|
non
oui (homme)
oui
oui
non
oui
|
non
non
oui
oui
oui
oui
|
Message #1
« Prescrire
des antibiotiques c’est prescrire de la résistance ». Cela tant au
niveau du germe que l’on souhaite éradiquer que de la flore commensale
(comme l’E. coli du tube digestif ou le pneumocoque de la gorge). Cette
prescription grève un peu le devenir du patient et il faut un certain temps
pour qu’il se débarrasse des isolats devenus résistants.
3. PRESCRIPTION
DES ANTIBIOTIQUES
3.1. 1ère question à se poser : s’agit-il d’une affection virale
ou bactérienne ?
La théorie est simple !
Si l’infection est suspectée est virale, il ne faut pas
prescrire d’antibiotique
Si l’infection est suspectée est d’origine bactérienne,
il faut se donner un certain nombre d’arguments qui tiennent compte des
antécédents du patient pour se guider vers une famille
d’antibiotique :
4
Prise d’antibiotiques dans les 6 derniers
mois : si oui, lesquels ?
4
Hospitalisation dans les 6 derniers mois ?
4
S’agit-il d’une infection récidivante ?
Mais de la théorie à la pratique, il y a un pas, et en particulier en
médecine de ville !
En situation de ville, peu de prélèvements à visée
bactériologique (étiologie et antibiogramme) sont pratiqués, et pourtant la
bonne pratique voudrait que l’on connaisse le germe en cause et sa
sensibilité pour une antibiothérapie adaptée. Il est possible qu’il y ait
des changements dans les recommandations dans un avenir proche pour limiter
les échecs et les récidives.
D’autre part, le décor dans lequel est prise la décision
de prescrire ou de ne pas prescrire est bien différent de celui qui existe
à l’hôpital où l’hospitalisé ne met pas en question une décision prise à
plusieurs.
En ville, la décision tient compte beaucoup du
tête-à-tête « patient-médecin » et des pressions
environnementales. A titre d’exemples, 2 scénarios peuvent être
rapportés :
4
Scénario 1
o
Le médecin : « C’est une rhinopharyngite
virale. Vous n’avez pas besoin d’antibiotiques »
o
Le patient : « Oui, mais l’année dernière
ma sinusite a fait suite à une rhinopharyngite, alors je n’ai pas envie que
ça recommence …»
4
Scénario 2
o
La maman : « La crèche m’a appelé car le
nez de mon enfant coulait et il avait 39° ».
o
Le médecin : « Pouvez-vous le garder chez
vous pendant 2-3 jours ? »
o
La maman : « Demain oui, mais pas après.
Il y a un mois, il a fait une otite. S’il a de la fièvre, ils ne le
prendront pas à la crèche, etc … ».
3.2. Les « politiques »
Ils ont pris conscience des difficultés des médecins de
« ville » dans leur prescription des antibiotiques et ils
ont demandé que l’on développe des outils qui permettraient aux médecins de
pouvoir tabler sur des éléments indiscutables avant de dire aux gens
« vous n’avez pas besoin d’antibiotiques ».
Deux réalisations récentes vont dans ce sens :
4
La mise à la disposition gratuite au corps médical
du Streptotest™ (TDR) comme aide au diagnostic étiologique des angines pour
permettre de ne traiter par antibiotiques que les angines à streptocoque
ß-hémolytique du groupe A.
4
La campagne par la CNAM de mise en condition de la
population pour que « Les antibiotiques, c’est pas automatique »,
afin d’aider le médecin dans son désir de limiter sa prescription
d’antibiotiques.
3.3. Le traitement des infections bactériennes en ville
La prise de conscience des « politiques » des
difficultés des médecins de ville devant la prise en charge des infections
bactériennes a mis en place comme outils d’aide à la prescription des
documents régulièrement mis à jour :
4
Les « Recommandations de bonnes
pratiques » è
http://www.agmed.sante.gouv.fr
4
L’« Observatoire National de l’Epidémiologie
de la Résistance Bactérienne aux Antibiotiques » : http://www.onerba.org
qui donne l’évolution de la résistance bactérienne
Devant une infection bactérienne, on doit se préoccuper
d’une part du patient, et d’autre part de l’antibiotique.
4
Bien que l’exigence du patient ne soit pas la même
en « ville » qu’à l’hôpital, il importe de se préoccuper :
o
de l’existence ou non d’un terrain allergique,
o
de ses antécédents à la recherche de facteurs de
risque de bactéries résistantes,
o
de la compliance au traitement, des effets
secondaires,…
4
L’antibiotique
o
Faire un choix de la molécule par rapport au taux
de résistance, basé sur la clinique mais aussi sur l’épidémiologie de la
résistance
o
La dose en fonction de la pharmacocinétique :
voie d’élimination, 1/2 vie, temps d’activité ou concentration dépendante,
l’âge …
o
La durée du traitement.
Message #2 :
Prescrire des antibiotiques, c’est faire un choix raisonné basé sur une enquête
« clinico-épidémiologique »
4. TRAITEMENT
antibiotique en fonction de la localisation
4.1. Le traitement des angines de l’enfant
Près de 90 % des
angines sont traitées par antibiotique alors que les angines virales en
représentent 60 à 75%. En gros, seules les angines à streptocoque du
groupe « A » justifient une antibiothérapie. Elles
représentent :
4
25 à 40 % des angines de l’enfant
4
10 à 25 % chez l’adulte)
(les angines diphtériques et à anaérobies sont rares)
Le traitement des angines à strepto ß-hémolytique, si
elles doivent être traitées, est bien codifié (recommandations AFSSAPS janv
1999) :
4
Traitement
habituel è
les ß-lactamines
o
La référence historique était la Pénicilline G ou V
(50 à 100 000 UI / kg / j en 3 prises, pendant 10 jours)
o
L’amino-pénicilline, 50 mg / kg / j en 2 prises,
pendant 6 jours
o
Céphalosporines de 1ère génération
4
Allergie aux
ß-lactamines è
macrolides
o
Azythromycine pendant 3 jours, 20 mg / kg / j en 1
prise
o
Clarithromycine pendant 5 jours, 15 mg / kg / j en
2 prises
o
Erythromycine pendant 10 jours, 30 à 50 mg / kg / j
en 3 prises
o
Josacine™ pendant 5 jours, 50 mg / kg / j en 2
prises
4
Angines
récidivantes : céphalosporines de 2ème et 3ème génération
(per os)
4.2. Les infections urinaires
Les infections urinaires sont fréquentes en médecine de
ville. Elles sont également fréquentes au niveau des urgences
hospitalières. qui se rapprochent.
Une étude a été faite de façon coordonnée dans le cadre
de 5 établissements de l’AP dont Ambroise Paré concernant des patients
venant aux urgences pour une pathologie infectieuse dont certains
recevaient une antibiothérapie :
4
70% venaient spontanément à l’hôpital
4
10% adressés par leur médecin
4
10 % venaient des cliniques
4
10 % de SDF.
Le tableau 3 répertorie, parmi ces patients ceux pour
lesquels une infection urinaire était suspectée (371) et la localisation de
cette infection. Ce tableau ne reflète pas exactement la situation de
ville, mais il permet de montrer les localisations les plus fréquentes et
la prédominance de l’E. coli comme germe le plus fréquemment en cause.
4
L’E. coli est la bactérie prédominante.
4
Les localisations les plus fréquentes sont la
cystite et les pyélonéphrites (75 % des IU)
Infection
suspectée
Patients
vus aux urgences
|
Nombre
|
%
|
Bactériologiquement documentée
|
Pyélonéphrite seule
Cystite seule
Prostatite seule
Uréthrite seule
Autre seule
Pathologies génito-urinaires associées
|
119
159
33
10
28
22
|
32,1
42,9
8,9
2,7
7,5
5,8
|
|
Total
|
371
|
100
|
207 (154 E. col)i
|
(d’après http://www.onerba.org)
De même les laboratoires de ville dans une étude en
réseau de 1996-97 arrivent à la même conclusion sur la prééminence de
l’E.coli.
Espèces
Laboratoires de ville (1996-97)
|
Aforcopi-Bio
n = 828 (%)
|
Epiville
n = 915 (%)
|
Escherichia coli
Protéus mirabilis
Klebselia
Entérobacter, Serratia
Pseudomonas, Actinobacter
Enterococcus
Streptococcus
|
67,9*
4,3
3,3
2,3
1,7
8
2,3
|
76,6
5,1
2,8
1,9
1,2
4,3
2,4
|
Staphylococcus
Autres
|
8,1
1,8
|
5
0,5
|
E. coli Intervalle de confiance (95%)
|
64-72 %
|
72-80%
|
Pour traiter l’infection urinaire, il faut tenir compte
de certains éléments cliniques :
4
De la localisation haute ou basse de l’infection
4
Du sexe. Chez l’homme, il y a plus souvent un germe
autre que l’E.coli
4
Des antécédents du patient (y compris
l’automédication)
La bactérie visée est essentiellement l’E. coli. Le
pourcentage de sensibilité aux antibiotiques des souches d’E. coli
retrouvées lors de l’étude de patients vus aux urgences est la suivante
(tableau 5).
Antibiotiques
|
Sensibilité en %
|
Amoxycilline
Augmentin®
Céfotaxime
Ac. nalidixique
Fluoroquinolones
Cotrimoxazole
Furanes
Fosfomycine
|
58
69
99
96
99
79
99
100
|
Dans les infections urinaires basses, comme l’infection
urinaire non compliquée de la femme jeune, il faut conseiller
- de boire abondamment
- utiliser un traitement per os de durée courte :
- minimum 3
jours
- maximum 5
jours en privilégiant :
les
quinolones 1° génération : Négram®
les
fluoroquinolones (Noroxine®)
le
cotrimoxazole (le Bactrim®) reste le traitement de référence aux USA,
malgré la diminution de la sensibilité)
Si la patiente est vue en « situation
d’urgence », on peut avoir recours à une seule injection par voie IM
d’un aminoside car l’élimination
est rapide par voie urinaire et à bonne concentration et leur sensibilité
vis-à-vis d’E.coli est très bonne. Le relais est pris avec une des
molécules citées ci-dessus (per os) pendant 3 jours.
Le Monuril® (fosfomycine) est utilisé en unidose.
Dans les infections urinaires hautes (pyélonéphrite), la
cefotaxime (Claforan®) ou les fluoroquinolones
Il y a deux raisons de faire la bithérapie mais il
s’agit d’une situation essentiellement hospitalière :
4
Dans les affections graves (septicémie), avec
l’association ß-lactamine + aminoside parce que l’on veut être bactéricide
(pyélonéphrite) et avoir une synergie des antibiotiques pour être
rapidement actif.
4
Pour éviter l’apparition de mutants résistants. En
ce qui concerne les aminosides, il n’y a pas de mutants résistants. La
résistance aux aminosides est une résistance plasmidique.
4.3. Les infections cutanées
Devant une infection cutanée, il faut
différencier :
4
Les lésions dues à la virulence bactérienne
(streptocoque ß-hémolytique du groupe A, staphylocoque auréus) nécessitent
une antibiothérapie par voie générale :
o
Oxacilline, cloxacilline pour une action
anti-staphylococcique
o
Amoxicilline à visée anti-streptococcique
o
Les lésions de type impétigo quand elles sont
disséminées peuvent bénéficier de la pénicilline V.
4
La surinfection superficielle de plaie ne nécessite
le plus souvent que d’une désinfection locale répétée et rapprochée (lavage
et antiseptiques). L’utilisation de pommade antibiotique reste discutée
(acide fusidique) car elle favorise la sélection de mutants résistants.
4.4. Les infections intestinales ou « diarrhée bactérienne »
Le traitement de ces diarrhées est toujours d’abord une réhydratation. Le recours aux
antibiotiques per os n’est envisagé que si la diarrhée persiste avec une
altération de l’état général :
4
amoxycilline,
4
fluoroquinolones (chez l’adulte seulement)
4
jamais
d’Augmentin®
Pour l’infections à Hélicobacter
pylori, il existe un test diagnostic simple et spécifique (basé sur un
carbone isotope ingéré et que l’on dose dans l’air expiré) permettant de
traiter par l’amoxicycline sans avoir recours à des gestes invasifs.
4.5. Les infections ORL et respiratoires
Sans revenir sur
le problème déjà traité des angines, on retrouve l’intrication virus /
bactéries au niveau des infections ORL hautes et respiratoires.
Les infections virales y sont fréquentes, elles peuvent
faire le lit d’une surinfection à partir de germes saprophytes qui peuvent
à cette occasion devenir virulent. Les antibiotiques n’étant pas actif sur
les virus, il n’est pas licite de les prescrire systématiquement. Leur
prescription doit être faite au bon moment.
Rhinopharyngites et facteurs de risque de complications
Chez l’enfant la complication la plus fréquente est
l’otite moyenne, chez l’adulte ce sont les sinusites. Les facteurs de
risque d’une otite infectieuse sont :
4
L’otite moyenne aiguë (OMA) récidivante (> à 3
OMA par an)
4
L’existence d’une otite séreuse
L’enfant doit revenir voir le médecin dès que des signes
évoquant les complications apparaissent :
Rhinopharyngite avec fièvre durant plus de 3 à 4 jours
et OMA :
4
OMA douloureuse è Pneumocoque
4
OMA douloureuse + conjonctivite è
Hémophilus influenzæ
4
Traitement :
4
Augmentin® : 80 mg / kg en 3 prises
4
Cefpodoxine proxetil (Orelox®) : 30 mg / kg en
2 prises
4
Traitement pendant 8 à 10 jours, 5 jours seulement
si enfant > à 2 ans
Rhinopharyngite trainante > à 7 jours + douleurs
faciales + pus au méat moyen = sinusite aiguë :
L’Hemophilus
influenzæ est suspectée è
traitement antibiotique de 8 à 10 jours :
4
Augmentin® : 2 g / jour en 2 prises
4
Céfuroxine axétil (Zinnat®, Cépazine®) : 500
mg / jour en 2 prises
4
Cefpodoxine procétil (Orelox®) : 400 mg / jour
en 2 prises
Les infections respiratoires
Infection suspectée
|
n
|
%
|
Pneumopathie
Bronchite chronique
Surinfection de BPCO
Bronchite aiguë
Autre
|
156
7
62
279
7
|
30,5
1,4
12,1
54,6
1,4
|
Total
|
511
|
100
|
Dans la même étude décrite plus haut, les patients reçus
aux urgences hospitalières, pour une infection respiratoire ont été classés
en fonction du type de pathologie (tableau). On y note le fort pourcentage
des bronchites aiguës et des pneumopathies
Antibiothérapie des bronchites aiguës
Elle sera instituée d’emblée dans les cas où il
existe
4
une pathologie respiratoire chronique
4
une co-morbidité associée (insuffisance cardiaque,
rénale, néoplasie, etc …)
4
une altération de l’état général, chez le sujet
âgé.
Elle sera retardée s’il persiste une expectoration
purulente au delà du 7ème jour
Les bactéries visées sont des bactéries colonisatrices
des muqueuses respiratoires et des bactéries intracellulaires (mycoplasme
fréquent chez le sujet âgé) contre lesquelles les macrolides et les
cyclines sont actives et à utiliser en première intention pendant 5 à 8
jours.
Antibiothérapie dans les pneumonies : quand ?
Le pneumocoque résistant tue parce qu’il va engendrer
des réactions inflammatoires et il tue même sous antibiotiques et
corticoïdes. Dès le départ, il faut évaluer les signes de gravité et
leur survenue nécessite l’hospitalisation
4
altération de la conscience,
4
atteinte des fonctions vitales,
4
température < 35 ou > 40°
4
néoplasie
4
pneumonie d’inhalation
Il faut ensuite rechercher des facteurs de risque de
mortalité. S’ils existent, il faut hospitaliser :
4
âge > 65 ans
4
maladie rénale,
4
insuffisance cardiaque,
4
immunodépression,
4
maladie cardio vasculaire,
4
drépanocytose, etc …
L’étude porte sur des patients reçus aux urgences. Le
tableau suivant concerne les pneumopathies de l’étude déjà signalée au
début du chapitre précédant. Les pneumocoques isolés dans cette étude
étaient pénicillino-résistants dans
17,7 % des cas.
Souche
|
Hémoculture
|
Secrétions respiratoires
|
Total
|
Pneumocoque
H.
influenzæ
Staph.
aureus
Autres
|
4
-
1
5
|
11
7
1
6
|
15
7
1
6
|
Total
|
10
|
25
|
35
|
Le tableau suivant étudie des souches de pneumocoques
isolées de bactériémies survenant au cours d’affections communautaires ou
nosocomiales (étude du CCLIN Nord
2000).
Souche
|
Com (n =193) (%)
|
Nosocomiale (%)
|
Sensible
Intermédiaire
Résistant
|
58,6
31,1
10,4
|
36,7
40
23,3
|
Les souches pénicillino-résistantes y sont très
fréquentes de 40 à 50 %.
Traitement antibiotique
Le patient peut être soigné en ville, si les
« critères » (signes de gravité et facteurs de risques de
mortalité) sont absents. Dans ces formes de gravité moindre, le taux de
résistance à la Pénicilline G est moins élevé et se situerait autour de 10
%. Le traitement de ces formes, y compris celles où le pneumocoque est de
sensibilité diminuée, nécessite le recours à un traitement antibiotique
4
De 7 jours au minimum – 14 jours au maximum
4
Antibiotiques :
o
Amoxicilline seule : 3 g / jour
o
Macrolides
Le vaccin anti-pneumococcique
Il est très efficace et couvre les principales variétés
de pneumocoques responsables
d’affection graves. Il faut vacciner comme pour la grippe les personnes à
risque (enfants, splénectomisés, drépanocytose, immunodéprimés, …)
Les légionelloses
Il faut savoir y penser, car elles ne sont pas rares
dans la pathologie de ville. Un
test diagnostic existe : la recherche d’antigènes spécifiques dans les
urines.
Le traitement : macrolides ou fluoroquinolones.
5. EN
CONCLUSION
Quelques éléments de réflexion :
4
100 millions de prescription d’antibiotiques en
France : 80 % en ville et 20 % à l’hôpital
4
La France, premier pays européen pour la
consommation d’antibiotiques en ville, deuxième pour la consommation à
l’hôpital
4
La résistance aux antibiotiques progresse à l’heure
actuelle plus vite que ne se développent de nouvelles classes
d’antibiotiques

|